Comme toujours, la neige est omniprésente dans les rues de Lathor. Son voile poudreux recouvre chaque rue de sa blancheur immaculée et ses toitures de chaumes en prennent également la teinte. Dans ce paysage monochrome au charme intemporel, la vie suit son cours, la fourmilière est en marche depuis bien avant le levé du soleil... Parmi ses résidents, Ewilan fait partie des lève-tôt. Plus qu'une habitude, c'est un besoin pour elle afin de ne pas avoir l'impression de n'avoir rien fait de la journée.

Aujourd'hui est d'ailleurs important pour l'entreprise familiale, c'est le jour des livraisons de la cité des neiges. Et comme sa mère l'a fait pendant des années avant elle, la femme-tigre a décidé de ne pas passer par un coursier et de s'occuper des livraisons elle-même. Cela vient d'une notion que lui a inculquée sa mère vis-à-vis du commerce : « Il est important de garder contact avec le client ». Des mots qui résonnent encore à l'esprit de la fille unique.

De sa démarche souple et féline, la jeune thériantrophe trimballe donc plusieurs emballages qu'elle tire à l'aide d'une luge. Toujours habillée chaudement, elle porte comme très souvent son ensemble de cuir finement travaillé par ses propres soins. De plus, elle a pris garde de ne pas effrayer les dit clients et s'est limitée d'une simple hache à une main qu'elle porte à la hanche afin de ne pas sortir nue : du moins, c'est ainsi qu'elle l'expliquerait si vous le lui demandez.

Elle s'arrête un instant au milieu de la place marchande qui précède le palais afin de rabattre sa chevelure en arrière. Son regard s'égare à l'horizon, celui des murailles gigantesques qui encerclent la cité et qui la protège depuis que les premiers de sa race sont venus s'installer dans cette région réputée très hostile. Ewilan sourit de manière incrédule et secoue la tête dans tous les sens.

Cette demoiselle ne comprend pas bien le besoin de se cacher derrière des murs de pierre aux tailles titanesques. Ne sont-ils pas de fiers guerriers ? N'ont-il pas pris résidence ici, car nul autre ne s'est trouvé capable de survivre dans ce climat rigoureux ? Elle qui vient des steppes, ne suit pas la même logique que les thériantrophes de la grande ville. Bien qu'ils soient souvent beaucoup plus instruits et fins stratèges que la demoiselle, elle se moque d'eux allégrement. D'un geste presque trop tendre pour la sauvageonne, celle-ci caresse le pommeau de sa hache. Une manière personnelle d'expliquer que c'est la seule chose qui est véritablement capable de la protéger.

Après quelques maisons dans lesquelles elle dépose un colis. Ewilan arrive au dernier de sa virée matinale : une paire de bottes qu'elle a créé en début de semaine. Si l'ouvrage n'est pas ce que la donzelle retient le plus de cette journée, c'est la rencontre bien que courtoise de mademoiselle Rose Albert. Difficile d'oublier son joli visage et son sens des affaires on ne peut plus rigoureux. Une vive envie de revoir la commerçante éprend la lathorienne. Un sentiment qu'elle ne peut concrétiser durant sa tournée et c'est avec regret qu'elle se focalise tant bien que mal vers sa destination.

L'entretien se fait court et respectueux comme avec les autres maisons rencontrées dans la matinée. La bouclier reste un tantinet distraite, contenir ses désirs n'est pas chose innée pour cette dernière. Au contraire, elle a toujours eu l'habitude de les laisser s'exprimer à grand flot. C'est donc sur cette pensée que la jeune femme délivre sa commande et reprend la route de la tannerie familiale pour y ranger son appareillage.

C'est à cet instant une teinte familière attire son attention. Une couleur chaleureuse et flamboyante, une rousse. Ewilan n'en voit pas très souvent dans le coin et à l'allure, cela ne peut pas être Skjöld, l'un des murmures au service de Castiel. La joie s'empare du visage de la tanneuse sous la forme d'un magnifique sourire, et ses pas se détourne de sa précédente destination pour s'avancer vers ce qui semble être l'une de ses nouvelles clientes.

« Rose ? » Interpèle-t-elle, une fois à quelques pas de la dite rouquine.

Quelle coïncidence ! Il s'agit bel et bien de mademoiselle Albrech. Et ce, pour le bonheur d'Ewilan qui pensait justement à elle, il y a quelques secondes encore. Son sourire avenant et sa douce voix sont toujours les mêmes. Une impression d'avoir manqué ce genre de détails s'éprend de la nordique alors que cela fait à peine quelques jours qu'elles ne se sont pas vu. La tanneuse répond immédiatement à Rose par un sourire tout aussi étincelant. On peut le plaisir dans son regard, elle est contente, chose rare notons le.

« Qu'êtes-vous venir chercher de beau sur le marché ? » Demande-t-elle afin d'engager la conversation tout en s'arrêtant aux côtés de l'humaine.

La thériantrophe jette un œil vers les étalages les plus prêts. Certains font des bijoux, d'autres ont des armes, il y en a aussi clafits de victuailles.

« Moi, je rentre de ma tournée. J'ai enfin terminé les bottes que vous aviez vues quand vous êtes passé à la boutique. » Dit-elle afin de donner le change.

« Cela m'a fait justement penser à vous. Heureux hasard n'est-ce pas ? »

Ewilan finit par remarquer qu'elle ne voit pas le supposé garde du corps de la rouquine. Elle aurait pu jurer que ce n'était pas le genre de l'homme de quitter Rose. Soit son instinct l'avait trompé soit que celle-ci l'avait congédié pour la matinée. N'étant pas trop du genre à se remettre en question, la bouclier opte mentalement pour la seconde option.

« Vous êtes seule, aujourd'hui ? » Demande-t-elle sous la forme de banalités.